Fonds de dotation
Jean-Pierre Bertrand

’’A Citron P’’, 1983

Entretiens avec Jean Daive

Interrogé par Jean-Daive, Jean-Pierre Bertrand revient sur sa participation à l’exposition Bonjour Monsieur Manet au Centre Pompidou, et sur son œuvre réalisée à partir du tableau Un bar au Folies Bergère.

Jean-Pierre bertrand © DR
Jean-Pierre Bertrand, A Citron P, Hommage à Manet, 1983
© Jean-Pierre Bertrand - ADAGP

Écouter le podcast : Édouard Manet 1832-1883, une émission de Jean Daive sur France Culture, 8 juin 1983

Jean-Pierre Bertrand : Le simulacre. Tout l’atmosphère de la salle, qu’il peint, est derrière lui, tour ce qui vie etc. est derrière son dos. Et là, il se voit quelque part en une femme Manet. Elle masque son corps à lui. Et là il y a un truc, on n’arrive pas trop à comprendre cette toile, est-ce elle qu’on voit à droite, qui est de dos, parlant à un homme ? ce n’est pas évident en fait.

Et moi, pour cette exposition Bonjour Monsieur Manet, j’ai travaillé sur un détail. Sur un détail de cette toile, à partir d’une reproduction photographique prise dans un livre, et il se trouve que dans ce livre la photo de cette reproduction tombe sur une double page et il y avait une charnière cousue main etc. donc je l’ai arrachée, j’ai défait l’image mais j’ai respecté la charnière qui se trouvait dans le livre à cet endroit-là.
Et c’est drôle parce que la charnière tombe juste dans son bras. Et la charnière c’est ce bras qui se renverse. Moi aussi j’ai fait un simulacre, si bien que ce bras semble appartenir à un autre corps. Ce qu’on voit à gauche du bras on ne sait plus si c’est un homme ou une femme. On dirait qu’il y a deux corps en présence et qu’il y a une femme de biais qui parle à un corps à sa gauche, et on ne sait pas si c’est un homme ou une femme. Et il y a quelque chose chez Manet je trouve qui a à voir avec ça. Cette sorte d’hétérosexualité, d’androgynie.
Je pense par exemple à la maitresse de Baudelaire, c’est une femme étendue comme ca sur un sofa, qui a une énorme main d’homme enfin complètement masculine, c’est très bizarre.
Même l’Olympia, pas son visage sa tête ne correspond pas à la position de son corps. Elle est légèrement redressée, il y a quelque chose qui se passe.

Jean Daive : elle a presque le cou cassé

Jean-Pierre Bertrand : Oui, le cou cassé, et cassé au lacet noir près on pourrait dire, ce lacet qui lace cette chose qui regarde frontalement, comme dans le déjeuner sur l’herbe, il y a une sorte de sourire là-dedans.
Et ce qui est très bizarre, dans l’Olympia c’est le rapport au noir de la femme noire, au noir du chat. Et le nacré du corps qui quelque part n’est pas du tout désirable je trouve, c’est une sorte d’image, c’est peint comme une porcelaine.
Le lacet, je pense à la femme au balcon, ce que j’aime beaucoup dans cette toile c’est le regard de cette femme perdue, bon, d’accord, mais c’est la densité du collier vert de cette femme qui m’a complètement frappé, et qui est terrible. En particulier dans cette toile qui a une dominante verte, dans les balcons… et puis ce collier vert, au ras du coup, qui as une force incroyable.

Bonjour Monsieur Manet, 8 juin - 25 septembre 1983



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